Bienvenue � la deuxi�me table ronde de la revue TEACH/LE PROF. Voici la premi�re d'une s�rie de trois parties. Les participants �changent sur l'�tat actuel de la technologie en �ducation, sur les m�thodes d'enseignement efficaces et sur la technologie en tant qu'outil pratique - o� et en quoi la technologie joue un r�le important pour aider les �l�ves � collaborer et � apprendre.
DL : Pour chacun d'entre vous, quel est le bilan de l'utilisation de la technologie en �ducation ?
JM : Il y a, � cet �gard, deux perspectives : celle des �l�ves et celles des enseignants. Si la plupart des enseignants sont familiaris�s avec la technologie au niveau personnel - ne seraitce que par le courrier �lectronique ou les services bancaires en ligne - ils ne sont pas aussi � l'aise pour l'utiliser dans leur classe. Ce probl�me est en partie d� au fait que bien des classes ne b�n�ficient pas du soutien technologique n�cessaire : elles ont une prise �lectrique d'un c�t� et une de l'autre, mais rien permettant d'installer, par exemple, un ordinateur pour pr�senter des informations au moyen d'un r�troprojecteur. Par ailleurs, les �coles sont mal organis�es pour acc�der au mat�riel. Ainsi, un chef de d�partement informatique pourra garder sous cl� toutes les ressources m�diatiques ou une seule personne g�rer tous les logiciels administratifs. C'est donc la capacit� de cette personne � communiquer ou � travailler en �quipe qui d�terminera la fa�on dont les ressources seront distribu�es. Il n'y a pas non plus assez de perfectionnement professionnel ax� sur les meilleurs moyens d'utiliser la technologie dans les classes, et les ateliers - il y en a - qui indiquent aux enseignants comment utiliser une application n'ont pas les effets d�sir�s car lorsque les enseignants regagnent leur classe, ils n'ont pas d'ordinateur ou celui-ci est en panne ou ils n'ont pas le logiciel voulu.
Par ailleurs, les �l�ves sont, eux, tr�s branch�s sur la technologie, la plupart ont acc�s � un ordinateur et n'ont jamais connu un monde sans l'Internet. Il y a donc un d�calage entre ce que les �l�ves savent en mati�re de technologie et la fa�on dont ils l'appliquent pour les aider � apprendre. Les enseignants pourraient mieux pr�parer les �l�ves � leur �ducation postsecondaire et au-del�, s'ils avaient un acc�s plus r�gulier � la technologie dans le cadre d'un programme mieux pens�.
RW : Lorsqu'on parle du combat pour la technologie en �ducation, nous abordons la seconde g�n�ration. Le syst�me �ducatif canadien est divis�. Il y a toute une gamme d'applications en usage ; cela va de choses qui seront toujours utilis�es dans vingt ans � d'autres mieux adapt�es � une classe du XIX^sup e^ si�cle. Nous avons gagn� la premi�re g�n�ration de la guerre technologique dans l'�ducation. Les forces qui cherchaient � stopper la technologie - surtout les enseignants - ont �t� d�faites. La technologie est maintenant bien inscrite dans les classes (en d�pit du fait que les enseignants y �taient violemment oppos�s), notamment parce que les parents estiment qu'elle repr�sente pour leurs enfants un important avantage concurrentiel eu �gard � leur carri�re. Suite aux pressions exerc�es par les parents et par la soci�t�, conseillers et administrateurs scolaires ont adopt� le concept de la technologie dans la classe et de l'ordinoculture sans n�cessairement bien savoir � quoi elle servira. La technologie dans la classe est devenue une valeur incontest�e : si elle en �tait absente, le syst�me scolaire ne s'acquitterait pas de ses responsabilit�s. Cette bataille a donc �t� gagn�e.
La prochaine bataille concernera l'utilisation de la technologie pour aider les �l�ves � apprendre et les enseignants � enseigner, seule chose v�ritablement importante. Cependant, pour les raisons avanc�es par Janet, nous sommes en train de la perdre en raison de la confusion technologique, de la coexistence d'�quipements v�tust�s et ultramodernes, de la mauvaise affectation des cr�dits � des �quipements inadapt�s et de l'existence d'un noyau d'enseignants qui ne savent pas vraiment les utiliser. En m�me temps, les �l�ves sont bien en avance sur leurs professeurs. � cet �gard j'aimerais apporter une pr�cision � ce qu'a dit Janet, � savoir que les �l�ves ne connaissent pas n�cessairement la technologie aussi bien que �a mais qu'ils la sentent intuitivement parce que, contrairement aux enseignants, ils ont grandi avec. Pour eux, c'est automatique, comme la respiration. Aujourd'hui aucun �l�ve d'une �cole publique n'a v�cu avant l'invention de l'ordinateur. Tr�s peu d'entre eux ont v�cu avant la g�n�ralisation de l'Internet (� l'exception des �l�ves des derni�res ann�es du secondaire). Ils ont, pour la technologie, un instinct qui fait d�faut � leurs enseignants. Ceci explique en partie le gaspillage de pr�cieuses ressources technologiques. Il serait pr�f�rable d'�liminer la technologie et d'utiliser les fonds pour recruter davantage d'enseignants. Ceci serait une fa�on plus judicieuse d'utiliser l'argent si souvent gaspill� actuellement. Mais ce n'est �videmment pas vrai partout. La technologie fait parfois des merveilles, mais c'est rare. En fait, actuellement, la technologie n'est pas une force enti�rement positive.
De plus, la technologie est un outil et non un r�sultat ; c'est pourquoi � il nous faut la technologie �. C'est un outil puissant si nous savons bien l'utiliser. Par contre, c'est un outil tout aussi puissant pour faire des d�g�ts si nous ne savons pas l'utiliser. � l'heure actuelle, le combat consiste � trouver l'�quilibre. En fin de compte, la bataille ne sera gagn�e que lorsque l'actuelle g�n�ration d'enseignants aura disparu et sera remplac�e par des jeunes qui sentiront et comprendront mieux la technologie.
SG : Il est difficile de faire le bilan de l'int�gration de la technologie dans l'�ducation au Canada parce qu'il n'y a aucune uniformit�, que ce soit entre les provinces ou entre les conseils scolaires. Dans certains endroits, la technologie est tr�s pr�sente, de m�me que le soutien et la formation, et elle est utilis�e � bon escient dans la classe, pour l'apprentissage comme pour l'enseignement. Mais il est difficile de savoir o�. Tout ce que je peux dire, c'est que lorsqu'on constate un leadership au niveau de la province, du conseil scolaire ou, plus g�n�ralement, de l'�cole (avec la direction ou la direction adjointe), la technologie est utilis�e de fa�on intelligente.
DL : O� avez-vous constat� ce type de leadership ? O� les ressources technologiques sont-elles disponibles ? Quels types de bonnes pratiques d'enseignement et d'apprentissage avezvous vus ?
SG : Je ne sais pas si l'uniformit� est fonction du type de technologie requis par le programme ou le niveau scolaire, mais ce que j'ai constat�, c'est que lorsqu'il y a ad�quation entre la technologie et l'enseignement, les enseignants et les �l�ves sont tr�s engag�s - il s'agit g�n�ralement d'une classe centr�e sur l'�l�ve o� les �l�ves collaborent et partagent, et o� la partie est �gale. Or, on peut tr�s bien avoir une classe comme �a sans technologie ; on ne peut donc pas dire que c'est en raison de la technologie que ces classes sont bien g�r�es ou qu'on y enregistre de bons r�sultats ; mais il est certain que dans ces classes la technologie est un outil pratique et m�me parfois un acc�l�rateur. Citons l'exemple d'une classe o� les �l�ves, travaillant en groupes, utilisent des ordinateurs pour r�aliser un projet. Un enseignant de Kingston m'a expliqu� qu'il avait un projet dans une classe de 6e ann�e o� les �l�ves collaboraient avec des �l�ves d'Isra�l pour d�couvrir la vie dans ce pays et vice versa. Cette d�marche, qui aurait �t� difficile et co�teuse il y a dix ans, est maintenant possible tous les jours. De plus, les �l�ves travaillent en groupes, ind�pendamment de leur professeur ; celui-ci intervient de temps � autre de fa�on ponctuelle. Cette formule permet donc une double collaboration : d'une part entre les �l�ves, et d'autre part entre les �l�ves et les enfants isra�liens. Cet environnement lib�re l'enseignant qui peut donc se consacrer aux �l�ves en difficult� ou qui ont besoin de lui � certains moments de leur apprentissage au lieu de s'asseoir devant sa classe � donner les m�mes consignes � trente personnes. Cela donne une classe plus dynamique, une classe dans laquelle mes parents seraient mal � l'aise � cause du bruit que font les �l�ves travaillant ensemble plut�t que de parler chacun leur tour.
Je suis tout � fait d'accord avec ce que dit Richard sur la � bataille qui a �t� gagn�e �, mais je ne pense pas que nous devrions nous y r�signer. Il y a encore quelques offensives et, en certains endroits, le concept d'utilisation de la technologie dans les classes est encore vivement contest�, ce qui ne me para�t pas n�cessairement une mauvaise chose. C'est une discussion n�cessaire et qui a toujours cours partout au pays.
RW : Il ne faut pas oublier qu'attendu que la technologie est un outil, les recherches ne sont pas unanimes. C'est ainsi qu'une �tude faite � l'Universit� de J�rusalem r�v�le que les r�sultats des �l�ves qui travaillent dans des �coles �quip�es d'ordinateurs �taient pires que ceux des �l�ves qui n'en avaient pas, et ceci sans tenir compte des ressources consacr�es � l'installation de ces ordinateurs dans la premi�re classe ; il est clair que l'�chec aurait �t� �vident pour la classe �quip�e d'ordinateurs. Par contre, une �tude effectu�e en Grande-Bretagne montre que les �l�ves du secondaire qui avaient acc�s aux technologies de l'information �taient d'un an � un an et demi en avance sur leurs cong�n�res. Ainsi, nous avons des r�sultats divergents quant � l'utilit� ou � l'inutilit� de la technologie, et force nous est de conclure que cela est d� � la fa�on dont elle est utilis�e. Lorsque les ordinateurs sont bien utilis�s, ce sont de puissants alli�s. Dans le cas contraire, ils constituent un poids mort.
JM : Je g�re actuellement un programme qui enqu�te sur le meilleur moyen d'utiliser la technologie dans la classe et sur ce que les enseignants pourraient faire avec. Simon nous a fourni un exemple de bonne utilisation de la technologie dans une classe, o� le programme passe en premier et o� la technologie apporte un plus, permettant � l'enseignant/e de faire des choses qui lui auraient �t� impossibles dans un cadre traditionnel de face � face.
Je crois que le probl�me tient en partie au fait que, dans la plupart des secteurs, la technologie est trait�e comme un ajout aux pratiques existantes plut�t que comme une partie int�grante de notre enseignement. Ceci entra�ne des � poches � d'enseignement novateur. Malheureusement, l'innovation n'est pas bien institutionnalis�e car les personnes qui g�rent le flux de l'argent dans le syst�me ne savent pas quelles pi�ces il faut d�placer pour soutenir le type de milieu d'apprentissage qui se pr�te � l'utilisation de la technologie. Ceci contribue grandement � l'�tat actuel de l'�ducation et � la confusion que nous connaissons. Pourquoi ne pas int�grer la technologie � nos m�thodes d'�ducation de fa�on � faciliter les r�sultats que nous savons possibles lorsque la technologie est utilis�e � bon escient ? � l'�vidence, lorsque quelqu'un enseigne bien, la technologie est bien utilis�e, et lorsque quelqu'un enseigne mal, m�me un manuel scolaire sera sans effet. Pour faire le meilleur usage de la technologie et l'incorporer dans l'enseignement ordinaire, il faudra �tablir des normes et des m�thodes pour une pratique qui marche.
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La technologie est maintenant bien inscrite dans les classes, notamment parce que les parents estiment qu'elle repr�sente pour leurs enfants un important avantage eu �gard � leur carri�re. -RW
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Ainsi, nous avons des r�sultats divergents quant � l'utilit� ou � l'inutilit� de la technologie, et force nous est de conclure que cela est d� � la fa�on dont elle est utilis�e. Lorsque les ordinateurs sont bien utilis�s, ce sont de puissants alli�s. Dans le cas contraire, ils constituent un poids mort.
-RW
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